Hypothyroïdie
Résumé des recommandations
- Pas de dépistage systématique
- TSH seule en cas de symptômes évocateurs
- +65 ans: pas d’examens complémentaires, traiter si TSH > 20 mUI/L (avis endocrino entre 10 et 20), borne supérieure de TSH = âge/10
- Traitement par LT: dosage de la TSH et adaptation par paliers de 12 µg toutes les 6-12 semaines sur critères clinico-TSH
- Puis surveillance TSH annuelle (sauf symptômes ou traitement perturbateur)
- Hashimoto: rechercher une maladie cœliaque associée
- Prochaines recommandations HAS en 2022
- Hypothyroïdie
- Dysfonctionnement thyroïdien le plus fréquent consistant en une sécrétion insuffisante d’hormones thyroïdiennes.
Souvent par altération de la glande mais parfois par atteinte centrale hypothalamo-hypophysaire.
La TSH est élevée et la T4L basse. - Les principales causes sont auto-immune et iatrogène (médicament, radiothérapie).
- Pas de dépistage systématique de l’hypothyroïdie en population générale.
- On la distingue de l’hypothyroïdie fruste ou infraclinique où la TSH est élevée de façon isolée.
- L’hypothyroïdie atteint 5% de la population, dont ⅔ de femmes et 10% des sujets âgés.
Facteurs favorisants l’hypothyroïdie
- Post-partum
- Antécédents personnels ou familiaux auto-immuns (ex. Maladie cœliaque)
- Irradiation cervicale
- Trisomie 21 et Syndrome de Turner
Étiologie
- Thyroïdite lymphocytaire chronique de Hashimoto
Forme hypertrophique prédominant chez la femme.
Goitre constant, diffus, volume modéré, ferme, souvent indolore et non compressif, pseudo-nodulaire.
Anticorps anti-TPO à taux élevés et aspect échographiques caractéristiques.
Aggravation progressive avec diminution du volume de la glande et du taux des AC.
Favorise la maladie cœliaque (dépister systématiquement) et le lymphome thyroïdien (< 1% des cas). - Thyroïdite chronique
Souvent asymptomatique, euthyroïdie
Taux élevé d’anticorps circulants, parenchyme hétérogène
Surveillance clinique et TSH annuelle. - Thyroïdite lymphocytaire chronique atrophique
Fréquente, féminine, post-ménopausique++
Ressemble au Hashimoto mais avec thyroïde de taille normale/diminuée.
Anticorps anti-TPO+ (75%) et anti-TG+ (50%).
Aggravation progressive comparable au Hashimoto. - Thyroïdite subaiguë de De Quervain ou virale
Dans les suites d’une infection respiratoire: syndrome grippal, inflammatoire avec un goitre ferme et douloureux.
Phase de thyrotoxicose puis hypothyroïdie le plus souvent transitoire. - Thyroïdite transitoire
Thyrotoxicose pauci-symptomatique puis hypothyroïdie séquellaire dans 20% des cas. - Thyroïdite du post-partum
Fréquente (5-10% des femmes), survient dans l’année, surtout si diabète type 1 ou taux élevés d’AC antithyroïdiens au 1er trimestre. Récidive dans 70% des cas à la grossesse suivante.
Souvent transitoire (70%), contrôle TSH à 1 an.
Souvent hypothyroïdie isolée, mais parfois une thyrotoxicose précède vers le 2e mois post-partum (reprise rapide du poids normal, nervosité). - Autres causes
- Iatrogène
Médicaments ou traitement thyroïdien par iode 131, thyroïdectomie et radiothérapie cervicale. - Hémochromatose
- Alimentaire
Manioc, cassave. - Polluants
- Iatrogène
Retentissement biologique de l’hypothyroïdie
- Hypercholestérolémie et hypertriglycéridémie
- Anémie isolée modérée normochrome normocytaire
- Augmentation des CPK/LDH
- Hyponatrémie de dilution
- Hypoglycémie
- Hyperprolactinémie
- Hyperuricémie
- Hyperhomocystéinémie
Parfois troubles de la coagulation et du bilan hépatique.
Interrogatoire
- Antécédents personnels
Zone d’endémie de carence, polyarthrite rhumatoïde, insuffisance surrénale. - Cause transitoire
Accouchement, iode 131, thyroïdectomie partielle, douleurs cervicales récentes. - Antécédents familiaux (auto-immuns ++)
- Traitements Amiodarone, lithium, IFNa, inhibiteurs tyrosine kinase, iode 131, radiothérapie cervicale, thyroïdectomie.
- Symptômes
Examen clinique
- Palpation thyroïdienne
Souvent ferme et hétérogène, pseudo-nodulaire, taille variable, goitre (Hashimoto) ou atrophique (thyroïdite). - Signes généraux
Asthénie (physique, intellectuelle, sexuelle), prise de poids modeste, constipation, sensibilité au froid. - Phanères
Secs et cassants, dépilation (queue du sourcil) et pousse lente des cheveux/poils, peau épaissie, froide, sèche et squameuse, teint carotinodermique (jaunâtre), cicatrisation lente - Myxœdème
Macroglossie, voix rauque ou grave, hypoacousie, vertiges, ronflements voire syndrome du canal carpien, gonflement des paupières. - Cardiaque
Bradycardie, assourdissement des bruits du cœur, hypertension artérielle fréquente, angor, épanchement péricardique si ancien. - Respiratoire
En atteinte sévère: épanchement pleural bilatéral, apnées du sommeil, bradypnée. - Neuro-psychologique
Ralentissement psychomoteur, syndrome dépressif et baisse de libido et érection, voire démence ou agitation chez le sujet âgé. Crampes, neuropathie périphérique. - Aménorrhée, infertilité
Bilan devant une hypothyroïdie
En 1re intention, doser la TSH seule.
Le dosage de la TSH peut être réalisé à tout moment de la journée (limites 0,4 mUI/L - âge/10 mUI/L après 60 ans).
TSH augmentée avec signes cliniques ou +10 mUI/L: prescrire pour le mois suivant: TSH + T4L. Sinon TSH seule à 3 mois.
TSH normale, pas de nouveau dosage avant 6-12 mois (sauf nouveaux signes cliniques).
Éviter le dosage en pathologie aiguë.
Si arguments pour étiologie auto-immune, dosage des anticorps anti-TPO. Il est inutile de renouveler ce dosage ainsi que de doser d’autres anticorps antithyroïdiens.
Interpréter les résultats de TSH et T4L
- TSH élevée et T4L basse: hypothyroïdie avérée.
Doser les anticorps anti-TPO (sauf personne âgée). - TSH modérément élevée de 4 à 10 mUI/L et T4L normale: renouveler les dosages à 3-6 mois.
- TSH élevée et T4L normale: hypothyroïdie fruste.
- Iodémie/iodurie élevée: hypothyroïdie par surcharge iodée
- Anticorps anti-TPO positifs: origine auto-immune.
Cas particuliers
- Hypothyroïdie dans les suites du traitement d’une hyperthyroïdie: T4L basse et la TSH peut rester basse/effondrée quelques semaines à quelques mois
- TSH élevée de façon isolée: artefact ou insuffisance rénale
- TSH normale ou diminuée et T4L basse: possible hypothyroïdie centrale par maladie générale sévère (syndrome de basse T4), perfusion de dopamine/dobutamine, corticoïdes à doses massives/Cushing sévère, dépression, grossesse
- TSH basse et T4L basse: traitement par carbamazépine (Tegretol®), phénytoïne
Rechercher une maladie cœliaque
En cas de Maladie de Hashimoto, rechercher une maladie cœliaque associée.
Échographie cervicale
Indications: nodule ou adénopathie palpable, signes de compression, palpation difficile, facteur de risque de cancer de la thyroïde (HAS 2021).
Pas d’indication à la scintigraphie en hypothyroïdie.
ECG
Recherche complication: bradycardie, allongement du QT, aplatissement ou inversion des ondes T.
Plus rarement bloc de branche, micro-voltage, torsade de pointe, extrasystoles ventriculaires.
Signes résolutifs sous lévothyroxine.
Délai avant amélioration des symptômes de 2 semaines après instauration du traitement. Certains signes peuvent perdurer quelques mois après l’instauration. L’équilibre plasmatique n’est pas atteint avant 6 semaines.
NB. Le traitement ne doit pas être débuté sans dosage préalable de la TSH
30% des traitements introduits sans TSH (HAS 11/2020 dysthyroïdies).
Lévothyroxine sodique (opothérapie substitutive)
Objectif: obtenir une TSH dans les valeurs normales ET la disparition des signes cliniques.
TSH minimale de 1 mUI/L chez le +65 ans.
Débuter le traitement
Initier à 1,7 µg/kg/j chez l’adulte.
Sujet âgé: 1,1-1,3 | Enfant: 2 | Coronarien: 12,5-25 µg/j
Adaptation par paliers de 12 µg toutes les 6-12 semaines.
+65 ans: débuter si TSH > 20 à 2 reprises, jamais si < 10. Avis endocrinologique entre 10 et 20.
Surveillance de la TSH tous les 6 mois pendant 2 ans, ou annuelle si TSH stable.
Spécialités de lévothyroxine disponibles
- Euthyrox® (ancienne formulation de Lévothyrox®, arrêt fin 2022)
- L-Thyroxin Henning®
- Lévothyrox®
- Thyrofix®
- Tcaps® (capsule molle, non remboursable)
- Buvables
- L-Thyroxine Serb® en gouttes pédiatriques
- Tsoludose® (non remboursable)
Les médicaments à base de lévothyroxine sont des médicaments à marge thérapeutique étroite permettant de mentionner « Non substituable ».
Consignes d’administration de la lévothyroxine
- Prise unique le matin à jeun 30 minutes avant toute prise orale (ou ≥ 3 heures après le dernier repas de la journée).
- En cas d’oubli: doubler la dose du lendemain ou prendre la dose du jour 3 heures après le dernier repas de la journée.
Dosage de la TSH à 6 semaines et adaptation par paliers de 6 à 12 semaines sur critères clinico-TSH.
Surveillance au long cours: Une fois l’euthyroïdie obtenue, contrôle clinique + TSH à 6 mois puis 1 fois par an. NB. Pas de surveillance du dosage des anticorps ou de l’iodémie/iodurie
- Si TSH déséquilibrée : vérifier le mode d’administration de l’opothérapie
- Si TSH légèrement anormale chez patient bien équilibrée et sans explication pour le déséquilibre: recontrôler la TSH à distance
- Si patient se plaint de persistance des symptômes malgré une TSH normalisée: Augmenter par petits paliers pour obtenir une TSH à la moitié de la fourchette des valeurs normales
Effets indésirables en cas de surdosage: tachycardie/palpitations, agitation, insomnie.
Surveiller la survenue d’attaques de paniques même en concentrations plasmatiques thérapeutiques.
Avis endocrinologique
Intérêt de l’avis d’un endocrinologue dans les situations suivantes:
- Au diagnostic
- Comorbidités
Coronaropathie, maladie auto-immune … - +65 ans avec TSH entre 10 et 20 mUI/L
- Comorbidités
- Pendant le suivi
- Doute concernant les cibles clinico-biologiques
- Absence d’amélioration ou survenue de symptômes
- Mauvaise tolérance du traitement
Sujets à risque
- La lévothyroxine perturbe l’INR chez les sujets traités par AVK
- Sujet coronarien ou âgé
Débuter à posologie basse, augmentation prudente et surveillance symptômes + clinique + ECG.
NB. On ne recherche pas toujours une normalisation de la TSH. - Hypothyroïdie fruste
- Grossesse
- Augmentation des besoins en L-thyroxine de 30 à 50% durant la grossesse.
- Urgence thérapeutique: Augmenter la dose en pré-conceptionnel et dès 7 SA, puis continuellement jusqu’à 14 SA. Stabilisation des besoins après 14 SA.
- Suivi rapproché et endocrinologique.
- Revenir aux doses habituelles dès l’accouchement sauf allaitement.
- Coma myxœdémateux
Urgence thérapeutique avec pronostic engagé (20-30% de décès).
Appeler le 15 pour transfert médicalisé en réanimation.
Hypothyroïdie secondaire
Une origine centrale est très rare et cliniquement moins sévère que lors de cause périphérique.
Syndrome d’insuffisance thyréotrope: Asthénie, céphalées, troubles de la fonction sexuelle.
Absence d’infiltration myxœdémateuse.
Autres axes hormonaux perturbés.
Diagnostic confirmé si TSH normale (85% des cas)/élevée (10%)/basse ET T4L basse
Cause hypothalamique ou hypophysaire le plus souvent tumorale ou iatrogène (chirurgie, radiothérapie, inhibiteur tyrosine kinase)
Suivi spécialisé.
Suivi thérapeutique par dosage de T3L + T4L qui doit être dans le tiers supérieur des valeurs normales, dosage de la TSH sans intérêt.