Pré-éclampsie

CNGOFMis à jour

Résumé des recommandations pour le généraliste

  • La pré-éclampsie est une hypertension artérielle gravidique (≥ 140 et/ou 90 mmHg apparaissant après 20 SA) avec protéinurie ≥ 0,3 g/24h qui survient sur 1 à 2% des grossesses
  • La pré-éclampsie (PE) est une urgence diagnostique et thérapeutique
  • Rechercher des signes de gravité et de sévérité devant faire appeler le SAMU
  • La prévention de la pré-éclampsie passe par la surveillance de la pression artérielle et de la bandelette urinaire à chaque consultation et en cas d’antécédents de prééclampsie, l’aspirine faible dose jusqu’à 35 semaines d’aménorrhée et la recherche de syndrome des anticorps anti-phospholipides (PE précoce ou sévère)

Pré-éclampsie (ou prééclampsie)
Hypertension artérielle gravidique (≥ 140 et/ou 90 mmHg apparaissant après 20 SA) avec protéinurie ≥ 0,3 g/24h nécessitant une hospitalisation. La délivrance du placenta est le seul traitement étiologique.
Elle est dite précoce avant 32 SA.
Elle atteint 1 à 2% des femmes enceintes. Les formes sévères peuvent entraîner le décès maternel et/ou fœtal.
Éclampsie
Crise convulsive généralisée survenant chez la femme enceinte ayant une hypertension gravidique. Elle est le plus souvent imprévisible.

Facteurs de risque de prééclampsie

  • Facteurs génétiques
    • Antécédents familiaux de pré-éclampsie
    • Origines Africaines
  • Facteurs immunologiques
    • Nulliparité (70-75%)
    • Changement de partenaire
    • Insémination avec donneur
  • Facteurs physiologiques: avant 20 ans et après 35 ans
  • Pathologies maternelles
  • Facteurs environnementaux
    • Hypoxie de haute altitude
    • Stress, travail
  • Facteurs associés à la grossesse
    • Antécédents de complications obstétricales: pré-éclampsie ou hypertension artérielle gravidique
    • Grossesse multiple
    • Môle hydatiforme

Épidémiologie de la pré-éclampsie en France

  • Prévalence de la pré-éclampsie: 1-2% des grossesses
  • 10% évoluent vers une pré-éclampsie sévère
  • L’incidence a diminué de 50% sur la période 2010-2020 …
  • Avec un ratio 0,5/100.000 naissances vivantes (2010-2012)
  • La pré-éclampsie sévère est une des principales causes de décès maternel …
  • Dont 70% seraient évitables avec une prise en charge adaptée
  • Responsable d'1/3 des naissances prématurées

Abréviations

CNGOF
Collège National des Gynécologues et Obstétriciens
PAS
pression artérielle systolique
PE
prééclampsie
RCIU
retard de croissance intra-utérin
SA
semaines d’aménorrhée
SAPL
syndrome des anticorps anti-phospholipides
SFAR
Société Française d’Anesthésie et de Réanimation

Une pré-éclampsie grave ou sévère nécessite l’appel du 15 / SAMU

Critères de gravité de la pré-éclampsie

Pré-éclampsie avec au moins un critère de gravité parmi:

  • Hypertension artérielle avec PAS ≥ 180 mmHg et/ou PAD ≥ 120 mmHg
  • Épigastralgies et/ou douleurs de l’hypochondre droit « en barre » persistantes ou intenses
  • Détresse respiratoire, œdème aigu du poumon (OAP)
  • Signes neurologiques: céphalées sévères résistantes au traitement, troubles visuels ou auditifs persistants, réflexes ostéo-tendineux vifs, diffusés et polycinétiques
  • HELLP syndrome
    Hémolyse (LDH > 600 UI/L) + ASAT/ALAT > 2N + thrombopénie < 100.000/mm³
  • Insuffisance rénale aiguë
    augmentation de la créatininémie ≥ 26,5 µmol/L (0,3 mg/dL) en 48 heures ou ≥ 50% en 7 jours ou oligoanurie < 0,5 mL/kg/h pendant ≥ 6 heures

Critères de la pré-éclampsie sévère

Pré-éclampsie avec au moins un critère de sévérité parmi:

  • Hypertension artérielle sévère (PAS ≥ 160 mmHg et/ou PAD ≥ 110 mmHg) ou non contrôlée
  • Protéinurie > 3 g/24h
  • Créatininémie ≥ 90 µmol/L
  • Oligurie ≤ 500 mL/24h ou ≤ 25 mL/h
  • Thrombopénie < 100.000/mm³
  • Cytolyse hépatique avec ratio ASAT/ALAT > 2N
  • Épigastralgies et/ou douleurs de l’hypochondre droit « en barre » persistantes ou intenses
  • Douleur thoracique, dyspnée ou œdème aigu du poumon (OAP)
  • Signes neurologiques: céphalées sévères résistantes au traitement, troubles visuels ou auditifs persistants, réflexes ostéo-tendineux vifs, diffusés et polycinétiques
  • Aggravation des signes ci-dessus

CNGOF, SFAR 2020

Une suspicion de pré-éclampsie est une urgence diagnostique et thérapeutique

Interrogatoire

  • Facteurs de risque
    • Nulliparité, grossesse multiple
    • Antécédents personnels et familiaux de pré-éclampsie
    • Facteurs de risque cardiovasculaires
    • Stress, travail
  • Valeurs de tension antérieures
  • Symptômes sévères
    • Diurèse
    • Céphalées
    • Épigastralgies, douleurs de l’hypochondre droit
    • Troubles visuels ou auditifs
    • Douleurs thoraciques

Examen clinique

Pendant la grossesse, mesure manuelle de la pression artérielle selon les recommandations ou par tensiomètre électronique validé pour la grossesse. (ESH 2023)

  • Mesure de la pression artérielle à chaque consultation, fréquence cardiaque
  • Fréquence respiratoire
  • Conscience
  • Poids et variation
  • Examen cardio-respiratoire
  • Examen neurologique complet (dont réflexes ostéo-tendineux)
  • Œdèmes
  • Bandelette urinaire

La découverte d’un RCIU d’allure vasculaire doit faire rechercher une pré-éclampsie.

« L’hospitalisation est systématique lors de la découverte d’une prééclampsie » (Collège)

Toute suspicion de pré-éclampsie doit être prise en charge dans des urgences obstétricales.

Si un traitement antihypertenseur intraveineux est impossible dans l’heure, voir avec la régulation pour l’administrer par voie orale: bêtabloquant labétalol 200 mg (Trandate®) en première intention.

Nicardipine ou alpha-méthyldopa si le bêtabloquant seul est insuffisant ou contre-indiqué.

Pour en savoir plus: pré-éclampsie

Le recours au traitement antihypertenseur est systématique en cas de pré-éclampsie sévère (≥ 160/110 mmHg) au repos et persistant plus de 15 minutes pour maintenir la pression sous ces seuils.

Le sulfate de magnésium est un traitement hospitalier.

Pour une pré-éclampsie sévère entre 24 et 34 SA sans signes de gravité materno-foetaux, la grossesse peut être poursuivie jusqu’à 34 SA.

Suivi après accouchement d’une grossesse avec pré-éclampsie

  • Contrôle de la pression artérielle et de la bandelette urinaire
  • Bilan des facteurs de risque cardiovasculaires
  • Informer sur le surrisque vasculaire (syndrome métabolique, AVC)
  • Consultation de néphrologie ou de médecine interne
  • Risque de récidive pendant une prochaine grossesse: 20-25 %
    • Suivi rigoureux avec consultation pré-conceptionnelle
    • Aspirine faible dose 75-160 mg/j avant 20 SA et jusqu’à 35 SA
  • Si pré-éclampsie sévère ou précoce: rechercher des anticorps anti-phospholipides (CNGOF post-partum)