Mésusage et sevrage de l'alcool

Alcoolodépendance, sevrage alcoolique

AFEFHASSFAMis à jour

Résumé des recommandations pour le généraliste

Nous avons conscience que cette page doit être simplifiée

  1. Repérage systématique: consommation moyenne par jour, fréquence mensuelle de consommation ≥ 6 verres, autres toxiques (voir Dépistage)
  2. Évaluation de la consommation d’alcool: score AUDIT-C ou FACE d’un mésusage et recherche de comorbidités (voir Évaluation)
  3. Intervention brève
  4. Dépistage des complications
  • 1 verre standard = 10g d’alcool. « Pour votre santé, l’alcool c’est maximum 2 verres par jour et pas tous les jours » et « toute consommation d’alcool comporte un risque pour la santé » (seuil de mésusage = 10 verres/semaine, affiche SPF)
  • 0 alcool pendant la grossesse et chez les enfants
  • Mésusage: 1 homme sur 3 et 1 femme sur 6
  • Prise en charge des co-addictions (tabac, cannabis), complications somatiques et troubles psychiatriques (MonParcoursPsy, dépression, anxiété…)
  • Dépister la Maladie du foie liée à l’alcool (MFLA): ≥ 14 verres/semaine et/ou âge ≥ 40 ans ET score AUDIT-C pathologique (voir Évaluation d’une consommation) par test de fibrose hépatique (FibroScan® ou biologique Fibrotest® ou Fibromètre Alcool). Arrêt du tabac et lutte surpoids, suivi addictologique
  • Accepter l’objectif de consommation du sujet car toute réduction de consommation est positive. + efficace: auto-évaluation quotidienne de la consommation
  • Abstinence est préférable en dépendance à l’alcool ou comorbidités. Si non souhaitée, accompagnement vers la réduction des dommages

Pour la pratique: liste des CSAPA et Annuaire des centres de soins

Alcool
Substance psychoactive la plus utilisée en France (suivie de tabac et cannabis). Plus précisément éthanol, obtenu par fermentation de fruits, grains ou tubercules.
Concentration plasmatique maximale atteinte en 45 minutes (90 pendant un repas). 95% est éliminé par le foie.
Un verre standard contient 10 grammes d’alcool pur (éthanol). Marqueurs de consommation: VGM (diminue en 3 mois à l’arrêt) + GGT (peu sensible avant 30 ans, diminue de 50% tous les 15 jours à l’arrêt).
Objectifs principaux de la prise en charge du mésusage: éviter l’évolution vers des complications somatiques ou psychiatriques, réduire les dommages consécutifs et améliorer la qualité de vie des patients.
Stéatopathie métabolique
Devrait être appelée stéatoses hépatiques métaboliques (Non-Alcoholic Fatty Liver Disease (NAFLD))
Lésions hépatiques non liées à l’alcool mais par insulino-résistance et inflammation métabolique liées à un surpoids.

5 catégories d’usage de l’alcool

  1. Non-usage ou abstinence
  2. Usage simple ou à faible risque
    Consommation asymptomatique et inférieure aux seuils recommandés (voir Dépistage).
  3. Mésusage
    • Usage à risque
      Asymptomatique mais susceptible d’entraîner des dommages.
    • Usage nocif
      Dommages somatiques, psychiques ou sociaux mais sans éléments en faveur d’une dépendance.
    • Usage avec dépendance (CIM-10) ou trouble de l’usage de l’alcool (TUA, DSM-V)

L’usage nocif et la dépendance sont caractérisés par des symptômes visibles sur le plan social, psychologique ou médical.

Sevrage
Arrêt de toute consommation d’alcool, qu’il soit intentionnel ou non.
Rechute
Reprise par le patient de fortes consommations ≥ 5 verres/j en 1 seule occasion pour l’homme < 65 ans, 4 si femme ou ≥ 65 ans (définition FDA avec verre à 14g).

Abréviations

AFEF
Association Française pour l’Étude du Foie
API
alcoolisations ponctuelles importantes (≥ 6 verres/occasion)
BZD
benzodiazépine
CDT
Transferrine désialytée (très spécifique d’un TUA)
CSAPA
Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA)
FACE
Formule pour Approcher la Consommation d’alcool par Entretien
GGT
Gamma-GT (Gamma glutamyl transpeptidase)
MFLA
Maladie du foie liée à l’alcool
RPIB
repérage précoce et intervention brève
SFA
Société française d’alcoologie
SSA
syndrome de sevrage alcoolique
TCC
thérapies cognitives et comportementales
TUA
Trouble de l’usage de l’alcool

Épidémiologie de la consommation d’alcool en France

Réduire la consommation d’alcool de 10% préviendrait la survenue de 2178 cancers annuels (Shield KD 2018)

  • 1re substance addictive en coût social, cause de décès liée au foie et cause de transplantation hépatique
  • 1/3 des décès prématurés
  • Décès: 41.000 annuels (30.000 hommes)
    • Cancers: 30.000 annuels attribuables (2e cause évitable derrière le tabac)
      Bouche, pharynx, larynx, œsophage, foie, côlon-rectum, sein. Augmentation du risque/unité alcool de 9 à 168% selon les localisations (bouche, pharynx, larynx +++).
    • Décès cardiovasculaires: 9900 décès annuels attribuables (HTA, AVC, FA)
  • Coût sociétal: 118 milliards annuels
  • Consommation excessive
    • La France est 6e des pays de l’OCDE (sur 34)
    • 23,7% des 18-75 ans dépassent les repères de consommation (2020)
      1 homme sur 3 et 1 femme sur 6
      48% ont un diplôme inférieur ou égal au baccalauréat
    • 10% des 18-75 ans absorbent 58% de l’alcool consommé
    • 11,7 L/an/+15 ans
  • Risque suicidaire: x90 quand > 100 g/j
  • Accidents
    • Décès sur la route: 1/3 par alcool
    • Risque mortel: x 8 (x 6 de 0,5 à 0,8 g/L)
  • Handicap
    Alcoolisation fœtale est la première cause de handicap non génétique.

Croyances sur l’alcool en France

  • 77% ignorent que l’alcool est la 2e cause de mortalité (La ligue 2018)
  • 54% n’ont pas le sentiment de prendre de risques en consommant (même > 10 verres/semaine, La ligue 2018)
  • 40% pensent qu’il n’engendre que le cancer du foie (La ligue 2018)
  • 75% ignorent les risques pendant la grossesse (BVA 2015)

Questions pour dépister une consommation à risque (mésusage):

Tableau. Repérage d'une consommation de substance psychoactive à risque d'après HAS 2021.
SubstanceQuestionsÀ risqueAction en consommation à risqueAction sans consommation à risque
AlcoolCombien de verres par jour ?> 2/jÉvaluation du risqueRenforcement des conduites favorables à la santé
Combien de verres par semaine ?ou > 10/sem
Combien de jours d'abstinence par semaine ?ou < 2/sem
CannabisFumez-vous du cannabis ?Oui
TabacFumez-vous du tabac ?Oui

HAS. Outil d'aide au repérage précoce et à l'intervention brève. Janvier 2021.

Demander aussi la fréquence des jours avec forte consommation ≥ 6 verres
Chez l’enfant: « Y a-t-il déjà eu consommation d’alcool au moins une fois ? »

Toute consommation pendant la grossesse est un mésusage: urgence addictologique, gynécologique, psychologique et sociale.
Idem sans urgence pour jeune (avec avis psychiatrique + parents), cirrhose, travail sur machine, chauffeur professionnel

Occasions pour dépister un mésusage: consultation de routine, prescription d’un médicament interagissant avec l’alcool, désir de grossesse, tabagisme, jeune adulte, troubles psychiatriques, précarité, pathologie cardiovasculaire, pathologie résistante au traitement (douleur, dépression, diabète…).

Les marqueurs biologiques n’ont pas d’utilité dans le repérage systématique du mésusage d’alcool (AFEF 2021)

Pratiques à risque majorant les dommages

  • Consommation épisodique massive: ≥ 6 verres/occasion
    dit binge drinking, biture expresse ou consommation importante épisodique (60g d’alcool pur en une occasion).
  • Association d’alcool et d’autre substance psychoactive

L’entretien motivationnel est empathique avec une écoute sans jugement et une acceptation inconditionnelle de la situation (acceptation et bienveillance), c’est un accompagnement.
Demander au patient l’autorisation de parler de sa consommation d’alcool.

Hétéro-questionnaire AUDIT-C pour le repérage d'un mésusage de l'alcool

Questionnaire Alcohol Use Disorders Identification Test de l'OMS

Sexe

Sur l'année écoulée:

Considérer des seuils d'intervention plus bas chez la personne âgée.
1. Combien de fois vous arrive-t-il de consommer de l'alcool ?
2. Combien de verres standards buvez-vous au cours d'une journée ordinaire où vous buvez de l'alcool ?
3. Au cours d'une même occasion, combien de fois vous arrive-t-il de boire 6 verres-standard ou plus ?

Score AUDIT-C

0

Veuillez répondre à toutes les questions

Bradley KA et al. AUDIT-C as a brief screen for alcohol misuse in primary care. Alcohol Clin Exp Res. 2007.

Hétéro-questionnaire FACE

Formule pour approcher la consommation d'alcool par entretien

Lorsqu'une consommation à risque est suspectée, les 5 questions doivent être de préférence posées sans reformulation.

Sexe
1. À quelle fréquence consommez-vous des boissons contenant de l'alcool ?
2. Combien de verres standards buvez-vous, les jours où vous buvez de l'alcool ?
3. Votre entourage vous a-t-il fait des remarques concernant votre consommation d'alcool ?
4. Vous est-il arrivé de consommer de l'alcool le matin pour vous sentir en forme ?
5. Vous est-il arrivé de boire et de ne plus vous souvenir le matin de ce que vous avez pu dire ou faire ?

Score FACE

0

Veuillez répondre à toutes les questions

Repérage d'une consommation excessive: Femmes (Se 84,4%; Spe 84%), Hommes (Se 87,8%; Spe 74%)

Arfaoui S. et al. Repérage précoce du risque alcool: savoir faire «FACE». Rev Prat Med Gen. 2004 ; 18 (641) : 201-5.

Questionnaire DETA pour le repérage d'un problème de consommation d'alcool

Adaptation française du questionnaire CAGE

1. Avez-vous déjà ressenti le besoin de diminuer votre consommation de boissons alcoolisées ?
2. Votre entourage vous a-t-il déjà fait des remarques au sujet de votre consommation ?
3. Avez-vous déjà eu l'impression que vous buviez trop ?
4. Avez-vous déjà eu besoin d'alcool dès le matin ?

CAGE-DETA

0

Veuillez répondre à toutes les questions

Mayfield D, McLeod G, Hall P. The CAGE questionnaire: validation of a new alcoholism screening instrument. Am J Psychiatry. 1974;131(10):1121-1123.

Une intervention brève doit être proposée aux patients identifiés comme présentant un mésusage d’alcool (AFEF 2021)

Encourager à tenir un agenda de la consommation et:

  • Informer
    • Restituer les résultats des questionnaires de consommation
    • Informer sur les risques concernant la consommation de substance et les bénéfices d’une réduction de la consommation
    • Clarifier ce qui constitue une consommation d’alcool à faible risque
      < 10 verres/semaine et < 6 verres par occasion
  • Échanger
    • Évaluer avec le consommateur ses risques personnels et situationnels
    • Identifier les représentations et les attentes du consommateur
    • Échanger sur l’intérêt personnel de l’arrêt/réduction de la consommation
  • Définir des objectifs
    • Identification des situations à risques et des stratégies pour y faire face
    • Expliquer les méthodes utilisables pour réduire/arrêter sa consommation
    • Proposer des objectifs et laisser le choix
    • Évaluer la motivation, le bon moment et la confiance dans la réussite de la réduction ou de l’arrêt de la consommation
    • Donner la possibilité de réévaluer dans une autre consultation
  • Orienter
    • Remettre une brochure, orienter vers un site, une application, une association, aide à distance…

De 0 à 10, évaluer:

  • La motivation pour réduire/arrêter sa consommation
  • Le bon moment pour réduire/arrêter sa consommation
  • Confiance dans la réussite du projet de réduire/arrêter sa consommation

HAS 2021

Rechercher les complications d’un mésusage de l’alcool et proposer un suivi spécialisé alcoologique.

  • Autres addictions
    Tabac 65%, cannabis, opiacés…
  • Complications sociales
    • Travail, contrat, formation
    • Foyer, famille, entourage
    • Hébergement, finances
    • Judiciaire, violence
  • Complications psychiatriques
    • Anxiété, dépression
    • Troubles du sommeil
    • Troubles de la personnalité (anti-sociale, borderline) ou bipolaire
      Évaluation nécessite consommation à faible risque pendant 15 jours.
    • Psychose
    • Évaluation du risque suicidaire
    • Troubles cognitifs
      Test MoCA à distance du sevrage voire évaluation neuropsychologique.
  • Complications somatiques
    • Accidents répétés
    • Érythrose du visage, hyperémie conjonctivale
    • Troubles digestifs
    • Maladie du foie liée à l’alcool (MFLA)
      Stéatose > stéato-hépatite (90% des buveurs excessifs) > cirrhose (10-20% des buveurs excessifs).
    • Polynévrite
    • Dépister une dénutrition (MNA)

Bilan complémentaire

Le bilan biologique est annuel:

  • NFS
  • ASAT, ALAT, GGT, PAL, TP
  • Bilirubinémie
  • Sérologies hépatite B et hépatite C
  • Sérologie VIH si expositions à risque
  • Occasionnel: glycémie à jeun et bilan lipidique
  • Si MFLA: FibroScan® ou biologique (Fibrotest® ou Fibromètre Alcool®)
    Interprétation des résultats selon les taux d’ASAT et bilirubine.
  • Consultation ORL
  • Consultation dentaire
  • Troubles neurologiques: bilan de dénutrition et carences (B1 ++)

Maladie du foie liée à l’alcool (MFLA)

Chez qui dépister la maladie du foie liée à l’alcool ?

Âge ≥ 40 ans ET score AUDIT-C pathologique (voir Évaluation d’une consommation)
ET/OU consommation déclarée ≥ 14 verres/semaine

Critères diagnostiques de la maladie du foie liée à l’alcool

Diagnostic de MFLA devant: mésusage de l’alcool, cytolyse 2-5N prédominant sur les ASAT, GGT augmentées, élimination des autres hépatopathies.
En cas de MFLA: test non invasif de fibrose hépatique systématique (FibroScan® ou biologique: Fibrotest® ou Fibromètre Alcool®), arrêt du tabac et correction d’un surpoids, suivi addictologique spécialisé.

Un bilan hépatique normal permet d’exclure une MFLA significative à court terme.
L’échographie hépatique n’a pas d’intérêt pour dépister une MFLA.

Tableau. Seuils diagnostiques du Fibrotest®, du FibroMètre Alcool®, et du FibroScan® dans la maladie du foie liée à l'alcool selon AFEF 2021
Fibrose septaleFibrose sévèreCirrhose
Fibrotest0,490,590,75
FibroMètre Alcool0,5930,947
FibroScan (kPa)
ASAT < 38,7 UI/L et bili < 9 µmol/L6,98,812,1
ASAT 38,7-75 et bili < 9
ou ASAT < 38,7 et bili 9-16
8,111,215,4
ASAT 38,7-75 et bili 9-168,812,319,9
ASAT > 75 et bili < 911,616,125,9

Fibrose septale = Metavir F ≥ 2, NASH CRN F ≥ 3 ; Fibrose sévère = Metavir F≥3 ; Cirrhose = Metavir F4, NASH CRN F4

Il est probablement recommandé d’arrêter complètement et définitivement tout usage d’alcool chez les patients atteints de cirrhose et/ou de CHC afin de limiter les risques de surmortalité (AFEF 2021)

L’objectif est l’amélioration de la qualité de vie des personnes.
Il est recommandé de promouvoir l’abstinence mais d’accepter les objectifs de consommation du patient s’il choisit une réduction de la consommation (idéalement à faible risque). Toute réduction de consommation doit être valorisée par le médecin généraliste.

Installer une alliance thérapeutique sur la définition du problème à résoudre et les objectifs à poursuivre.

  • Favoriser le soutien de l’entourage
  • Ressources de soins
    • Adresser d’emblée si mésusage très sévère, comorbidités, isolement/précarité, jeune (consultations jeunes consommateurs)
    • Consultation d’addictologie
    • Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA)
    • Équipe de liaison en addictologie
    • Annuaire par géolocalisation
  • Livret d’information
    Maladie alcoolique, sevrage, intérêt de l’accompagnement, coordonnées des acteurs.
  • Intervention psychosociale
  • Antidépresseur
    Seulement si persistant après 4 semaines d’abstinence.
  • Sexologie
  • Médecin du travail
  • Conseils diététiques
    Appétence sucrée marquée au sevrage.
  • ALD 30, MDPH

Vitamines dans le sevrage alcoolique

  • Thiamine (vitamine B1 selon l’état nutritionnel, 30-80% de carences)
    500 mg/j pendant 5 jours puis 250 mg/j pendant 14 jours. Voie IV si dénutrition.
  • Sujet dénutri
    Vitamines B6 (max 1 mois), PP, C, acide folique, zinc et magnésium quelques jours.

Suivi

  • Lutte contre les facteurs de rechute
  • Consommation: VGM et GGT à 3, 6 et 12 mois
  • Arrêt du tabac
  • Rechute: rassurer et déculpabiliser

Le sevrage de l’alcool peut le plus souvent être un sevrage ambulatoire mais nécessite un suivi médical rapproché.

Indications au sevrage hospitalier en alcool

Seulement 3 indications aux services d’Urgences: complications somatiques sévères, crises suicidaires, agitation avec agressivité

Indications à l’hospitalisation pour une abstinence:

  • Présence ou antécédent de crise convulsive ou de delirium tremens
  • Autres toxiques à doses élevées (dont BZD)
  • Contre-indication aux benzodiazépines
    Insuffisance respiratoire, cirrhose décompensée, TP < 50%, obésité, personne âgée.
  • Isolement, SDF
  • Syndrome de Korsakoff ou encéphalopathie de Gayet-Wernicke
  • Envisager dans les situations suivantes
    • Syndrome de sevrage important, échecs ambulatoires itératifs
    • Comorbidités (psychiatrique…)
    • Âge ≥ 75 ans
    • Demande de l’entourage
    • Grossesse

Post-cure ou soins de suite et de réadaptation alcoologique (SSRA) à envisager: échecs des soins optimaux antérieurs, période d’abstinence minimale à obtenir, troubles psychiatriques à étayer, somatiques ou cognitifs sévères, précarité, demande personnelle ou familiale forte.
Peut être prolongée en centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).

Thérapeutiques pour le sevrage alcoolique

Lorsque l’objectif est l’abstinence, le sevrage alcoolique et tabagique combiné préparé est recommandé.
L’abstinence est la cible en complication somatique (cirrhose ++).

Prévention du syndrome de sevrage alcoolique (SSA)

« Dans la majorité des cas, le sevrage ne requiert pas de traitement pharmacologique » (SFA 2015)

Diazépam 5 mg 2-2-2-2 à J1
1-1-1-1 à J2 et 3
1-1-1 J4
1-0-1 J5 et arrêt (max 10)

Doses adaptées aux symptômes résiduels et réduites chez l’adolescent et le sujet âgé.
Rester à la maison les 2 premiers jours, pas de conduite automobile pendant les 5 jours.
Suivi rapproché durant le traitement.

AFEF 2021 et SFA 2015

Symptômes de sevrage possibles jusqu’à J10 après l’arrêt de l’alcool: benzodiazépines à demi-vie longue type diazépam max 8-10 jours (SFA 2015).
Patient âgé (≥ 75 ans) ou cirrhotique: oxazépam ou lorazépam en diminuant la dose 30-50%.

Les dépressions sont fréquentes (80%) au cours du sevrage de l’alcool, mais seules 15% persistent à son issue. Recontrôler à 2-4 semaines après le début du sevrage avant d’introduire un antidépresseur.

Signes et symptômes du sevrage alcoolique
Troubles subjectifs
anxiété, agitation, irritabilité, insomnie, cauchemars
Troubles neurovégétatifs
sueurs, tremblements, tachycardie, hypertension artérielle
Troubles digestifs
anorexie, nausées, vomissements, diarrhée

Confusion: évoquer encéphalopathie hépatique (cirrhotique ++), hématome intracrânien, surdosage médicamenteux, complication métabolique ou carentielle.

Prévention des rechutes

Les benzodiazépines n’ont aucune indication dans l’aide au maintien de l’abstinence

Prise en charge du maintien de l’abstinence des personnes dépendantes par acamprosate (ex Aotal®) ou naltrexone (ex Revia®) en première intention pour diminuer l’envie de consommer. Avis spécialisé en cas d’insuffisance hépatocellulaire.
Les traitements doivent être arrêtés après 4-6 semaines si la consommation d’alcool persiste.

  • Acamprosate 333 mg
    • L’acamprosate est introduit dès que possible après le sevrage. Supériorité pour le maintien de l’abstinence et meilleur niveau de preuve
    • 2 cp x 3/j (2-1-1 si < 60 kg) pendant 1 an. Peut être poursuivi si bénéfique et souhaité par le patient
  • Naltrexone 50 mg
    • Bénéfique en fortes consommations
    • La naltrexone est débutée après le sevrage
    • 1/2 cp avec une surveillance d'1 heure. Puis prise de l’autre moitié et 1 cp/j pendant 3 mois (jusqu’à 6 mois si bénéfique et souhaité)

Autre médicament pour le maintien de l’abstinence:

Disulfirame 500 mg (Espéral®):

  • Le disulfirame déclenche un effet antabuse avec toute source d’alcool (boisson, nourriture, parfum). Risque de neuropathie périphérique et hépatotoxicité
  • Indication: patient motivé souhaitant l’abstinence avec ce médicament. Nombreuses interactions et contre-indications
  • Après ≥ 24h de la dernière consommation: 1 cp/j
  • Suivi 2/mois 1 mois, puis 1/mois 4 mois puis 2/an

Rappel: Il est recommandé de promouvoir l’abstinence mais d’accepter les objectifs de consommation du patient s’il choisit une réduction de la consommation (idéalement à faible risque < 10 verres/semaine).
Toute réduction de consommation doit être valorisée par le médecin généraliste.

Objectif de réduction de la consommation d’alcool

Après essai de réduction spontanée de 15 jours, le nalméfène est le médicament de référence de la prise en charge.

Nalméfène 18 mg (Selincro®) 1 boîte
1 cp tous les jours où vous pensez être exposé au risque de boire. À prendre 2 heures avant le moment du risque ou dès le matin.
Réévaluation à 7 et 14 jours puis 1/mois au moins 6 mois.

Autre traitement: baclofène (Baclocur®, max 80 mg/j, n’est plus remboursé), 30 mg/j en cas de cirrhose.

Alcool Info Service.fr ou 0 980 980 930.

Bénéfices de l’arrêt de l’alcool

  • Psychiques
    • Humeur
    • Anxiété
    • Risque suicidaire
  • Somatiques
    • Cirrhose
  • Troubles cognitifs dont Korsakoff (20% s’améliorent)

Alcoometre.fr

Auto-évaluer sa consommation

Affiches pour le cabinet

Repères pour maintenir une consommation à bas risque:

  • Pas plus de 10 verres standards par semaine
  • Pas plus de 2 verres par jour pour les hommes et les femmes
  • Prévoir des jours sans consommation au cours de la semaine

À savoir:

  • Pas d’effet protecteur à faible dose
  • Un seul verre par jour suffit à augmenter le risque de développer l’un des 23 problèmes de santé associé à l’alcool. (Addictions France 2018)

Autres messages essentiels, à chaque occasion de consommation:

  • Réduire la quantité totale d’alcool que vous buvez à chaque occasion
  • Boire lentement, en mangeant et en alternant avec de l’eau
  • Éviter les lieux et les activités à risque
  • S’assurer que vous avez des personnes que vous connaissez près de vous et que vous pouvez rentrer chez vous en toute sécurité

L’option la plus sûre est de ne pas consommer d’alcool en cas de:

  • Conduite automobile
  • Manipulation d’outils ou de machines (bricolage…)
  • Pratique de sports à risque
  • Consommation de certains médicaments
  • Existence de certaines maladies

Femmes enceintes

« zéro alcool pendant la grossesse », « vous buvez un peu, il boit beaucoup » (SPF)

Adolescents et enfants

« Pour limiter les risques pour votre santé, l’option la plus sûre est de ne pas consommer d’alcool. »

Addictions France 2018

Sevrage en alcool chez le prisonnier

Suivi en CSAPA pénitentiaire.
En cas d’hospitalisation nécessaire, unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI).

Approche psychosociale du sevrage alcoolique

Autocontrôle comportemental

Intervention psychosociale la plus efficace dans l’objectif de réduction de la consommation.
Déterminer ensemble:

  • Les limites de consommation
  • Tenir un agenda quotidien de consommation
    Mesure la plus efficace.
  • Apprentissage des stratégies de refus
  • Mesures de renforcement du succès
  • Analyse des situations à haut risque
  • Apprentissage de comportements alternatifs

Gérer la résistance du patient

L’entretien motivationnel est empathique avec une écoute sans jugement et une acceptation inconditionnelle de la situation (acceptation et bienveillance), c’est un accompagnement.
Demander au patient l’autorisation de parler de sa consommation d’alcool.

De 0 à 10, évaluer:

  • « Sur une échelle de 0 à 10, à quel point est-il important de modifier votre consommation d’alcool ? »
  • « À quel point vous sentez-vous capable de modifier votre consommation ? »
  • « À quel point vous sentez-vous prêt à modifier votre consommation d’alcool ? »
Patient très résistant

Explorer ensemble l’ensemble des avantages que représentent la consommation d’alcool. Puis explorer les éléments moins positifs (ambivalence).
Avec le temps, lorsque le patient évoque d’abord l’importance du changement, des changements hypothétiques peuvent être amenés dans la conversation. Ce qu’ils pourraient être, les bénéfices à en attendre, les stratégies qui pourraient être mises en place.