Vertige positionnel paroxystique bénin (VPPB)
Résumé des recommandations pour le généraliste
- Devant un tableau de vertige positionnel paroxystique bénin (VPPB), vérifier l’absence de signe d’alerte, ne pas manquer l’AVC
- Examen ORL pour un premier épisode de vertige positionnel, en cas de signes atypiques ou de fragilité (antécédent de traumatisme crânien ++)
- Pas de traitement efficace des vertiges sauf par manœuvres par un kinésithérapeute ou ORL (surtout si vertiges invalidants, risque de chute ou de fracture)
- Résolution spontanée de l’épisode de vertige positionnel paroxystique bénin dans la semaine voire le mois
- Réévaluation systématique à 1 mois d’un épisode de VPPB
- Vertige positionnel paroxystique bénin
- Pathologie fréquente (17-42% des consultations pour vertiges) définie par l’apparition d’un vertige induit par un changement de position de la tête, avec des caractéristiques cliniques rigoureuses (notamment absence de lésion vestibulaire ou neurologique).
L’atteinte peut être bilatérale et atteindre plusieurs canaux semi-circulaires en même temps. Le VPPB survient surtout à un âge moyen. - Le pronostic est favorable mais les vertiges peuvent altérer la qualité de vie d’autant plus que la durée de cet épisode est imprévisible.
- Le consensus s’accorde sur la responsabilité d’une canalolithiase d’un canal semi-circulaire (postérieur dans 85-95% des cas) pour la survenue de ces vertiges. Il est le plus souvent idiopathique (70%) mais parfois secondaire à un traumatisme crânien (20%) ou à certaines pathologies de l’oreille interne (10% avec névrite vestibulaire ou Maladie de Menière).
Diagnostic différentiel des vertige positionnels paroxystiques bénins
Plusieurs maladies doivent être différenciées d’un vertige positionnel (VPPB) qui a un examen sans atteinte neurologique.
Devant une instabilité, rechercher une hypotension orthostatique.
Vertiges avec des signes otologiques d’origine périphérique
- Maladie de Menière
Vertige de 20 minutes plus invalidant. Le VPPB peut être secondaire à une Maladie de Menière. - Labyrinthite ou névrite vestibulaire
Vertige de début progressif ± augmenté en changement de position, qq jours à semaines, souvent précédé par syndrome viral. Le VPPB peut lui être secondaire. - Déhiscence du canal semi-circulaire supérieur
Vertiges et oscillopsies provoquées par des sons intenses, un effort, des changements de pression dans le CAE ou une manœuvre de Valsalva. Parfois surdité fluctuante. Scanner des rochers. - Fistule périlymphatique
Proche du précédent. Souvent post-traumatique. Scanner des rochers. - Commotion labyrinthique post-traumatique
Vertige, instabilité, surdité sur les aigus et acouphènes. Tout traumatisme crânien est potentiellement responsable de VPPB. - Vertige otolithique post-traumatique
Instabilité, flottement ± modifié au mouvement de tête, parfois associé à un VPPB.
Vertiges avec des signes neurologiques
- AVC
- Vertiges positionnels d’origine migraineuse
- Insuffisance vertébro-basilaire
- Maladie démyélinisante
- Tumeurs intracrâniennes et lésions de la fosse cérébrale postérieure (3%)
- Syndrome post-commotionnel d’origine centrale
Abréviations
- AVC
- accident vasculaire cérébral
- CAE
- conduit auditif externe
- CSC
- canal semi-circulaire
- MRC
- manœuvre de repositionnement des canalithes
- VPPB
- vertige positionnel paroxystique bénin
Signes d’alerte devant des vertiges
Drapeaux rouges à rechercher devant chaque épisode de vertiges:
- Épisode d’allure de VPPB prolongé plus d’un mois
- Neurologiques
- Contexte de traumatisme crânien ou cervical
- Céphalée (violente et brusque ++)
- Cervicalgie d’apparition récente
- Déficit neurologique (diplopie, ataxie …)
- Nystagmus atypique (battant vers le menton, spontané ou persistant au regard fixe)
- Marche impossible sans chute
- ORL: surdité brusque, acouphènes ou otalgie
Le caractère « bénin » nécessite des critères précis et un examen rigoureux en période vertigineuse. Adresser à l’ORL en l’absence de formation spécifique ou pour un premier épisode.
« Un vertige positionnel doit être toujours très suspect d’une atteinte centrale durant l’enfance » (SFORL 2012)
Interrogatoire
Rechercher les signes et symptômes du VPPB et étayer le diagnostic différentiel:
- Antécédents
ORL, neurologiques (migraine 34%), infection récente, manipulations cervicales, cardiovasculaires (HTA 52%), diabète. - Traitements ototoxiques ou hypotenseurs
Sels de platine, aminoside, isoniazide, nitrofurantoïne, certains antiviraux, IPDE-5, certains AINS et opioïdes. - Vertiges
- Sensation rotatoire avec illusion de mouvement, avec ou sans perception visuelle d’une rotation du décor
- Transitoire
- Durée du VPPB généralement < 1 minute, répétée plusieurs fois par jour
- Déclenchée immédiatement par un mouvement de tête
- Reproductible dans certaines positions
- Dominante matinale avec tendance à l’amélioration dans la journée
- Période d’une semaine à 1 mois
Avis systématique quand durée > 1 mois
- Signes associés possibles
Cervicalgies modérées, nausées (vomissements rares), pâleur, sueurs. - Recherche des signes d’alerte (voir section précédente)
- Terrain spécifique
- Chutes à répétition
Risque majoré en baisse d’acuité visuelle, neuropathie. - Personne âgée ou ostéoporotique
Suivi spécialisé pour la prévention des chutes. - Diabète
Hypoglycémie, neuropathie. - Antécédent de traumatisme crânien
Suivi spécialisé ++, manœuvres répétées. - Anxiété
Prolonge les symptômes.
- Chutes à répétition
- Signes négatifs
- Enfant
Le VPPB est exceptionnel et doit faire recherche une atteinte neurologique. - Facteurs de risque cardiovasculaire
- Examen neurologique anormal
- Signes otologiques
Surdité, hypoacousie, acouphènes, plénitude de l’oreille ou chute à l’emporte-pièce sans perte de connaissance.
- Enfant
Examen clinique
Examen strictement normal dans l’intervalle libre des vertiges.
Adresser à l’ORL en l’absence de formation spécialisée.
- Manœuvre de Dix-Hallpike (se 80%, spe 70%)
- La manœuvre de Dix-Hallpike déclenche un nystagmus caractéristique lors d’une atteinte du canal postérieur: nystagmus vertical (mouvement rapide vers le front) et rotatoire (pôle supérieur de l’œil bat vers le sol). Le nystagmus augmente en intensité puis disparaît en moins d’une minute.
- Elle est dite positive quand déclenche simultanément vertige et nystagmus.
Voir les vidéos dans la section Sources plus bas.
Autres examens:
- Pression artérielle assis et debout
- Otoscopie
- Examen neurologique complet
- Examen cardiovasculaire
- Évaluation du risque de chute chez les personnes fragiles
Adresser à l’ORL au premier épisode de vertiges pour examens auditifs systématiques.
(Audiométrie tonale et vocale, impédancemétrie)
Les autres examens dépendent de l’avis de l’ORL ou de VPPB atypiques (IRM ++).
La résolution du vertige positionnel (VPPB) spontanée survient souvent dans la semaine (30%) voire le mois mais les récidives sont très fréquentes.
Rechercher une autre cause quand l’épisode de vertiges dure plus d’un mois.
La plus grande part du traitement consiste en l’information du patient: mécanisme du VPPB et identification et compréhension des symptômes.
Attente d’une résolution spontanée: aucun médicament n’a prouvé d’efficacité pour le traitement des vertiges positionnels paroxystiques bénins (VPPB).
Réévaluation systématique à 1 mois (car lésions du SNC attribuée à VPPB de 1-3%).
Ordonnance: Bilan-diagnostic kinésithérapique, manœuvres thérapeutiques pour vertige positionnel et contrôle si nécessaire
Manœuvres de repositionnement des otolithes
La prise en charge du VPPB par des manœuvres est indiquée en cas de vertiges prolongés, invalidants ou chez les personnes à risque de chute.
Elles peuvent aggraver transitoirement les symptômes.
- VPPB du canal semi-circulaire postérieur
Manœuvre de repositionnement des otolithes (Manœuvre d’Epley) ou manœuvre libératoire de Semont (60% de guérison, 90-98% en manœuvres répétées). - VPPB du canal semi-circulaire horizontal
Manœuvre de Lempert et Tiel-Wilck ou la manœuvre de Gufoni et al. - VPPB du canal semi-circulaire antérieur
Pas de recommandations.
Traitements inutiles : acétylleucine (Tanganil®), bétahistine, piracétam, méclozine, dompéridone (Vogalène®), métoclopramide (Primpéran® ainsi que les autres anti-émétiques)